La célébration de la nativité du prophète Mohamed (qsssl) a lieu chaque année dans la wilaya d’Adrar. Elle est apparue au XIII ème siècle en Égypte sous l’époque des Ayyoubiine et passe ensuite au maghreb et à Tlemcen à partir du XVème siècle. Appuyée par les zaouia et les confréries religieuses, la fête du Mawlid Ennabaoui a progressé vers le Sahara à partir du XVI ème siècle. Durant cette cérémonie, tous les saints locaux sont évoqués.
Une véritable relation est établie au niveau cérémonial entre deux éléments, le baroud (danse du baroud) et la hadra ( groupe avec bendir). Deux groupes distincts mais qui se retrouvent mélangés pour la circonstance. Si les hommes s’activent dans la préparation de la poudre, des fusils et des tenues vestimentaires qu’ils porteront à cet effet ;les femmes, elles, par contre, commencent après avoir moulu les grains de blé ou réceptionné les sacs de farine et de semoule, à préparer le couscous pour la préparation des repas. D’autres femmes qui ne sont pas affectées à des tâches précises s’occupent à créer une ambiance particulière par des chants et des suppliques à la gloire du prophète. Ce moment festif est une tradition bien établie et bien ancrée dans la région. La célébration du Mawlid Ennabaoui par deux contrées bien distinctes. Adrar, et Timi ksar Bouali, se partagent la cérémonie de la fête. Timimoun et ses environs fêtent le ‘Sboue’ le baptême où beaucoup de personnes affluent de partout, même de pays limitrophes tels que le Mali, le Niger, et parfois de France. Depuis plus d’une semaine, les habitants s’affairent sans relâche au nettoyage de la cité. Les femmes, quant à elles, dans une ambiance colorée et fraternelle, roulent ce fameux couscous aux quarante ingrédients, très apprécié par les visiteurs et les convives. Dans les mosquées, des versets coraniques sont psalmodiés du crépuscule au lever du soleil où une grande’ fatha’ regroupe l’ensemble des fidèles à l’aube, afin d’invoquer la bénédiction et le pardon divins. Une tradition ancestrale pour immortaliser cet événement religieux.
Les autochtones sont parés de leurs plus beaux accoutrements, où le blanc domine, la tête étant recouverte d’un long turban (chèche) qui les protège du soleil. Les femmes portent des tenues étincelantes (izar) ou (el galba) se faisant belles pour la circonstance par l’application d’un maquillage traditionnel où le «khol» et le «meswek» mettent en valeur leur beauté. Le henné est omniprésent et tous (hommes et femmes) s’enduisent les mains, les pieds, en guise d’ornement. Les troupes folkloriques défilent dans les ksour de Tamentit et de Bouali à 12 et 85 km du chef-lieu Adrar. Des youyou fusent de partout agrémentant gaiement cette ambiance. Le baroud constitue l’attraction principale de cette journée. Dans des gestes immarcescibles, des hommes dansent, armés de fusils. Leur danse vous fait valser et le rythme vous empêche de rester sur place sans effectuer le moindre mouvement. Les mouvements intensifs persistent, soulevant l’engouement général de la foule ; puis, dans un éclair étourdissant et assourdissant, la poudre tonne dans un immense nuage de poussière sous les applaudissements nourris des spectateurs abasourdis. Cette joie et cet enthousiasme qui se lisent sur les visages rassurent, et dans un élan de solidarité généralisé, chacun est heureux, oubliant pour un instant les tracasseries de la vie quotidienne afin de se laisser bercer et emporter par ce rythme qui déferle inlassablement. Une pause est marquée aux environs de treize heures, toutes les personnes présentes sans exception aucune, se dirigent vers les demeures grandes ouvertes ,histoire de faire ripaille !
Assis à même le sol, formant des groupes de huit ou dix personnes, les convives s’installent. Dans un ordre immuable, lait, dattes, melfouf (brochettes) défilent. Puis arrive enfin ce fameux couscous, orné de viande et de légumes recouvert d’un plat métallique. Son odeur affole et emballe vos papilles. Sitôt le couvercle soulevé, quelqu’un, qui aurait au préalable, lavé les mains, se saisit et s’empare de la viande entamant une répartition parcimonieuse : c’est le tessmar. Un morceau de viande est mis dans le trou creusé devant chacun, que des mains expertes s’empressent de faire disparaître au fond du gosier avec une cuillerée de couscous.
Salade, fruits et limonade clôturent le repas
Ensuite vient le moment tant attendu, celui de siroter les verres de thé qui vous râpent la langue. Le spectacle reprend l’après-midi et les gros tam-tam ‘aghlal’se font entendre au loin rameutant une foule ravie.
La fête se prolonge tard dans la soirée par des parades de danses où les hommes se livrent un combat en croisant le fer (épées de fabrication artisanale) ; parfois des gourdins les remplacent sous le rythme saccadé des ‘bendir’. Cette danse, appelée ‘sara’ attire de nombreux curieux et d’habitués qui bravent le froid et où chacun se réchauffe comme il peut, n’osant point quitter cet endroit magique et ensorcelant. L’encens parfume cette atmosphère où des formules incantatoires sont récitées où la foi est de rigueur. On relève quelques chants religieux qui reviennent souvent dans ce récital : El borda, El hamazia, Elbaghdadi. Certaines familles saisissent cette opportunité pour procéder à la circoncision de leurs enfants, d’autres pour finaliser l’apprentissage des 60 versets du Coran. Les rites de courtoisie ont une valeur permanente et hospitalière. L’appel est lancé pour le développement et la réhabilitation du tourisme dans la région auxquels Madani fouatih, le wali, attache une importance prépondérante et en fait son cheval de bataille. Les nombreuses visites sur le terrain, un suivi régulier et rigoureux constituent un véritable palan pour l’épanouissement de cette wilaya. Car la réhabilitation du tourisme dans cette partie de l’Algérie profonde, véhicule l’âme de toute une population et conjugue toute l’esthétique qui fait toute la valeur du produit historique de la région parce qu’il est l’expression vivante de toute une société qui la distingue des autres sociétés : Une société qui n’a rien mais qui a tout, d’une société qui a tout mais qui n’a rien.
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